Un an après : Se remémorer la tragédie du Phoenix
PHUKET : Le 5 Juillet 2018, les préparations du sauvetage des 13 jeunes footballeurs bloqués dans la grotte de Tham Luang à Chiang Rai étaient la priorité. Les jeunes garçons avaient été localisés, et la pluie qui s’annonçait rendait urgent leur sauvetage avant que la mousson ne rende la tâche plus compliquée.
Et, pendant une après midi plutôt ordinaire, deux bateaux de tourisme, le Phoenix et le Serenata, retournaient à Phuket après une demie journée de snorkelling près de Koh Racha. La météo prévoyait des vagues et des vents du sud ouest, saisonniers de la mousson. Une bulletin météo avait été publié prévoyant des orages pour la fin d’après midi. Pour des raisons inconnues, les capitaines des deux navires décidèrent de retourner à Phuket malgré ce bulletin d’alerte, ou sans en avoir connaissance. L’horizon au sud ouest annonçait de mauvaises conditions de navigation.
Zheng Lancheng était venu de Chine, accompagné de sa femme, sa fille, son beau fils et sa petite fille de 18 mois, pour des vacances tropicales dans le sud de la Thaïlande. Le Phoenix transportait 101 passagers, 89 touristes – tous sauf 2 étaient chinois – 11 membres d’équipage et un guide.
Alors que les bateaux quittaient Koh Hei, au sud ouest de Phuket, un front orageux approchait Phuket, et recouvrait les bateaux qui étaient ballotés par les vagues. Les vagues, selon le capitaine du Phoenix, atteignaient les 5 metres, mais étaient en réalité plus proche des 3 metres.
Un bateau de la taille du Phoenix, entre les mains de quelqu’un de compétent, aurait dû pouvoir affronter ces conditions, bien qu’incomfortables pour les passagers, avec facilité.
Mais le Phoenix n’était pas qu’un bateau banal de 29 metres fait pour la plongée, présentait des failles importantes de design et de construction qui ont largement contribué à la catastrophe. Des blocs de béton placés dans la cale en guise de ballaste devaient assurer la stabilité. Ces blocs se sont déplacés alors que le bateau chavirait, rendant pire une situation déjà très mauvaise. Le bateau n'avait qu’une porte étanche, au lieu de quatre. Ses vitres, qui ont éclaté sous la pression de l’eau, n’étaient pas faites de verre de marine.
M. Zheng et sa famille n’ont pas compris ce qu’il s’est passé. Le bateau ‘tremblait’ et les passagers, qui restaient silencieux, étaient ‘visiblement effrayés’. SOudain, le bateau a commencé à vaciller et a chaviré. Les passagers ont commencé à crier. La plupart se trouvaient encore dans les ponts inférieurs en raison de la pluie. Peu portaient des gilets de sauvetage ou des vestes de flottaison. M.. Zheng, dans un pont supérieur avec sa famille, agrippait sa femme qui était blessée au genou. Puis soudain il s’est retrouvé dans l’eau. Par la suite, de nombreux survivants ont été retrouvés portant des équipements de sauvetage non conformes.
Il a signalé à la police qu’aucune alerte n’avait été donnée, et que l’équipage n’avait pas conseillé aux passagers ‘d’abandonner le navire’.
D’autres témoins ont raconté que le capitaine et l’équipage, tous sains et saufs, ont été les premiers à quitter le bateau, laissant derrière eux plus de la moitié des passagers dans les ponts inférieurs et beaucoup d’autres patauger dans les eaux alentours.
M.. Zheng a dû lutter dans l’eau pour pouvoir atteindre un des radeaux de sauvetage, avant d’être repêché par d’autres passagers désorientés. Le bateau avait déjà coulé.
“Sur le radeaux gonflable, personne ne parlait. Tous étions sous le choc. On entendait que le bruit des vagues.”
M. Zheng a indiqué que si les passagers avaient su qu’il y avait un radeau de sauvetage, les passagers auraient probablement mis un gilet de sauvetage et sauté à l’eau pour être secourus.
“Mais nous n’en savions rien. Personne ne nous a averti ni conseillé.”
13 enfants sont morts dans cette catastrophe. Beaucoup d’autres passagers ont été retrouvés par la suite, mort, flottant la tête immergée, près de leurs parents également morts.
Au total, 47 personnes sont mortes.
L’autre bateau, le Serenata, a lui aussi coulé au large de Koh Mai Thon, mais ses 42 passagers ont tous été secourus.
Dans les jours qui ont suivi la catastrophe, de nombreuses erreurs ont été commises par les officiels et les politiques thaïs. Celle du premier ministre adjoint Prawit Wongsuwan qui accusait le ‘vrai’ propriétaire du bateau déclarant que cette situation n’était que “des chinois qui tuent des chinois”, faisant référence à la compagnie propriétaire du bateau financée par des chinois possédant une société ‘annexe’ en Thaïlande pour respecter la loi.
“Des chinois utilisent des prête noms thaïs pour faire venir des touristes chinois. Ils ne tiennent pas compte des avertissements, et c’est pourquoi cet incident s'est produit. Il faut remédier à cela” déclarait Prawit.
Mais quels avertissements? Le bateau avait été approuvé et enregistré par le autorités thaïes. Clairement inapproprié, le bateau avait été autorisé à réaliser des excursions payantes, tout ça sous le regard des officiels thaïs. Après toutes ces accusations, la cause de la catastrophe repose aux pieds des autorités thaïes, du capitaine thaï et de l’équipage thaï qui avaient le contrôle total pour éviter toutes ces morts.
Puis, dernière insulte, le gouvernement thaï a voulu mettre aux enchères l’épave du Phoenix d”clarant qu’il fallait payer pour le parking du bateau au chantier naval de Rasada ou est conservé la relique.
Un an plus tard, les retombées de la catastrophe peuvent être complètement mesurées. La plus évidente est la baisse du nombre de touristes chinois. Les réseaux sociaux chinois ont ‘massacré’ la gestion de la crise du Phoenix et ont recommandé aux touristes chinois d’éviter Phuket et la Thaïlande. Et cela s’est produit.
Le nombre d’arrivées de touristes chinois a baissé de manière dramatique, entre 30 et 50 pourcents par rapport à l’année précédente. La baisse du tourisme chinois a touché toute la Thaïlande malgré les mesures prises par le gouvernement qui a suspendu les frais de visa à l’arrivée et créé des files d’attente spécialement dédiées aux chinois’.
Sur le plan médiatique, Phuket a évité le pire car les médias internationaux étaient focalisés sur la grotte de Tham Luang. La catastrophe du Phoenix n’a pas eu l’écho qu’elle aurait dû avoir en temps normal.
Mais la réputation de Phuket a été atteinte. Les conséquences de ces 47 morts inutiles a terni l'île et la ternira pendant encore de nombreuses années.
Les touristes chinois eux trouvent de nouvelles destinations et il est peu probable qu’autant reviennent à Phuket.
Le nouveau gouverneur de Phuket, Phakaphong Tavipatana, a déclaré dernièrement qu’il n’y aurait pas de cérémonie à la mémoire des 47 victimes de la catastrophe “car personne n’en veut”. Il a également indiqué dans la presse que le gouvernement et les touristes chinois avait repris confiance dans la sécurité à Phuket car le nombre de touristes chinois avait commencé à augmenter depuis l’incident.
Aujourd’hui, un an après la catastrophe, la météo à Phuket est bonne, avec des vents modérés, quelques nuages et une temperature de 31°C, une journée parfaite pour une excursion au large de Phuket. Espérons que les évènements du 5 Juillet 2018 ont pu permettre de renforcer la sécurité des maritime.
Article original : The Thaiger